Vous l'aurez compris, le but de notre voyage n'est pas de faire du tourisme. Malgré cela, Notre route coupe parfois celle des grands circuits touristiques. Cela nous réjouit parfois, nous effraie souvent, nous pose questions à chaque fois... Notre premier arrêt touristique fut à Siem Reap, où nous avions trois jours à attendre avant le défi du Mékong. Une bonne occasion de visiter les temples d'Angkor. Une foule de touristes dans des temples datant du IXème siècle. Nous sommes éblouis par ce site archéologiques absolument splendide. Et pourtant... Pourtant, entre les temples, quand nous voyons ces jeunes enfants qui vendent des peintures, de l'eau, des bracelets, ou tout ce qu'ils peuvent vendre, notre mission pour Enfants du Mékong revient au galop. Et alors qu'ils nous déballent leurs phrases apprises par cœur : "Hello, where do you come from ? From France ? Bonjour, La capitale de la France est Paris." nous ne pouvons nous empêcher de nous poser nos propres questions. Quel avenir pour ces enfants ? Si les touristes, attendris par ces petites têtes brunes, ne leur achetaient rien, ils ne seraient probablement pas là... L'équation est simple : tant que des touristes continueront à acheter, leurs parents (ou souvent la "mafia" qui les utilise), continueront de les envoyer vendre. Comment les aider alors ? Au Cambodge comme ailleurs, le parrainage via Enfants du Mékong aide les familles à acheter les fournitures scolaires et l'uniforme, mais compense aussi la perte de revenus provoquée par l'envoi de l'enfant à l'école. Alors en arpentant les ruines, nous pensons à ces enfants, en espérant que, comme des centaines d'autres au Cambodge, ils auront un jour l'opportunité de reprendre un chemin normal pour leur âge : celui des écoliers. Nous ne parlerons pas ici de l'état des ruines, qui se dégradent chaque année sous les pieds des touristes, mais cela pourrait être également un débat intéressant. Quelques mois plus tard, nous nous arrêtions à Luang Prabang, l'ancienne capitale du Laos. Arrêt un peu forcé par nos freins défaillants, qui nous donnent l'occasion de passer 3 jours dans l'ancienne capitale. Luang Prabang est connue pour l'aumône des moines. Chaque matin les moines défilent dans les rues, recueillant les offrandes des fidèles. Le spectacle de ces robes orange-vif est magnifique...ou plutôt était. En effet, ce ne sont plus les fidèles, mais bien des milliers de touristes en short qui achètent de la nourriture pour les tendre aux moines, et avoir ainsi 'THE photo' ! Évidemment, le but étant d'avoir la photo du moine le plus près possible, certains touristes allant jusqu'à bloquer la file de moines pour prendre une photo en ultra gros plan. La deuxième attraction est la visite de villages alentours, peuplés de minorités ethniques. "Vous verrez plusieurs minorités en une journée. 3+1 bonus !" proposent certains tours !" Vous verrez comment ils vivent, leurs habits, vous pourrez même partager un verre d'alcool local avec eux, etc..." C'est tout juste s'ils ne proposent pas de leur jeter des cacahuètes, lors de ces véritables visites de zoos humains, pour certains tours. Certains habitants sont même devenus dépendant à l'alcool ou à l'opium. Évidemment le touriste ne boit qu'une fois, n'essaie la pipe d'opium qu'une fois ; l'habitant, lui, le fait à chaque passage de touristes... Nous croisons un couple de français très sympathiques et commençons à discuter. Ils nous racontent leur déception : faute de bus, ils n'ont pas pu aller dans un "petit village magnifique sans aucun touriste où les habitants n'ont, d'après le guide du routard, jamais vu d'appareil photo. "Ca avait pourtant l'air tellement typique et authentique, nous expliquent-ils. Leur conclusion nous achève : "En plus, depuis ce matin, on a croisé plusieurs touristes qui y sont allés cette semaine, et ils nous ont tous dit que c'était génial !"... ..." N'est ce pas le propre d'un tour bien organisé, de faire croire que chacun est unique ? Comment concilier tourisme et développement durable ? Le passage de ces groupes de touristes dans les villages apporte une source de revenu considérable pour les habitants. Certains touristes laissent un dollar à chaque enfant qu'ils prennent en photo ; en 5 photos, le gamin a récolté plus d'argent que son père qui a travaillé 10 heures à la rizière. 'argent ramené est parfois géré collectivement, permettant un développement intelligent du village : électricité, routes, écoles... Mais la société de consommation, soeur jumelle du développement, apporte également son lot de nouveaux besoins ; dans un village karen pourtant sans électricité, Justin Bieber rugissait dans le portable dernier cri de certains ados. Ceux-ci étaient tous fiers de nous montrer leurs photos glanées sur internet, en prenant soin de tourner leur portable lorsqu'il s'agissait de photos pornographiques. Le tourisme de masse nous choque dès que nous y sommes confrontés. Nous sommes conscients de la chance que nous avons, de pouvoir partager des moments authentiques sans l'intermédiaire d'une agence ou d'un guide, de pouvoir partager le quotidien des familles qui nous accueillent sans l'intermédiaire de l'argent. Chance aussi de passer en vélo dans des lieux où le tourisme est inexistant. Mais nous sommes bien conscients que si tout le monde faisait comme nous, cela ne pourrait pas fonctionner. Nous avons souvent en tête cette phrase échangée de nombreuses fois entre backbacker : "il faut se dépêcher d'y aller, avant que ça devienne trop touristique." Ne faut-il pas y entendre plutôt "Gâchons-le vite nous même avant que les autres ne nous le gâchent" ? "Ça ne dérange pas trop, il n'y a presque pas de touristes". Mais le tourisme de masse n'est-il pas la somme de milliers de touristes isolés dont nous faisons partis, que nous le voulions ou non ? Pourtant, nous sommes convaincus que le tourisme est aussi une chance, une ouverture sur le monde, une ouverture aux autres, un choc culturel bénéfique pour tous, à condition de respecter quelques règles, que nous nous efforçons et nous efforcerons de suivre pour nos futurs voyages : se renseigner sur la culture du pays avant de partir pour en respecter les règles élémentaires (tenue vestimentaire, politesse, etc.), refuser les tours ne respectant pas l'environnement ou les habitants, même si cela implique de voir moins de choses, choisir le tourisme durable, le tourisme qui respecte les populations, les fait participer, le tourisme qui protège l'environnement, le tourisme parfois un peu plus long, un peu moins photogénique, mais tellement plus durable et respectueux. Nous avons conscience d'être, nous aussi, deux des touristes qui font la masse, deux des touristes qui ont envie de découvrir, de prendre de jolies photos, de vivre des moments authentiques, de rencontrer. Alors, à chaque lieux touristique, nous nous posons cette question : comment découvrir, et partager sans abîmer ? La question est toujours ouverte, et nous serons ravis si vous nous partagiez vos expériences, vos résolutions et vos conseils ! A vous de jouer ! NB : De nouveaux défis ont été relevés, vous pouvez voir le résultat ici ! Et pour ceux qui se posent des questions sur le parrainage, notamment suite à notre précédent article, n'hésitez pas à aller voir les questions du jour : Comment est géré l'argent d'EdM, Comment sont choisis les filleuls, etc.
3 Commentaires
Isabelle
5/22/2015 12:48:04 am
Toujours un immense plaisir de suivre votre aventure et de vivre par procuration certes mais vibrer quand même un peu avec vous devant les photos, les croquis (magiques!) et vos commentaires.
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Bonjour et bravo pour votre voyage. J'aime les gens engagés et passionnés !
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Adeline
5/28/2015 01:00:55 am
Mes Chers Asie-Cycletteurs,
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